Jülich : ville jumelle

Jülich, ville jumelle d'Haubourdin, située en Rhénanie du Nord-Westphalie, presque à mi-chemin entre Aix-la-Chapelle et Cologne, peut revendiquer des origines au moins romaines.

Juliers est la traduction française du nom allemand

Le nom de Juliacum -hommage à Jules César- ne permet pas d'affirmer que la ville fut fondée, ou restaurée, aussitôt après la conquête des Gaules par le général romain. En tout cas, au deuxième siècle de notre ère, un relais de poste pour les courriers impériaux était établi et Juliacum était une place forte commandant les passages du Rur qui, au cours des siècles, valurent bien des malheurs à Jülich.

Pendant plus de trois siècles, les Germano-Romains y connurent la vie d'une ville de garnison tandis que, dans les campagnes voisines, les paysans et les anciens légionnaires "pensionnés" cultivaient leurs terres. Le calme était troublé, parfois, par les incursions des "Barbares" ou par le branle-bas des "expéditions de police" au-delà du Rhin

Au début du cinquième siècle, les choses prennent un autre caractère. Les Francs submergent les défenses romaines et conquièrent la province de Basse-Germanie avant de se répandre à travers la Gaule. Les liens entre la Rhénanie et le Nord de la France durèrent longtemps encore. La dynastie carolingienne est originaire d'Herstal, près de Liège. On en a fait, en français, Pépin d'Héristal. Et Charlemagne régnera à Aix-la-Chapelle.

Il faudra le partage de l'Empire, après la mort de l'Empereur "à la barbe fleurie", pour que diverge le destin des deux régions. Cependant, si les ducs de Jülich font figurer dans leurs armoiries un lion dressé, c'est par privilège des comtes de Flandres en reconnaissance de l'aide apportée au combat. Les armes d'Haubourdin, héritées de la famille du Chastel de la Howardies, comportent aussi un lion dressé.

Jülich. La porte des Sorcières, vestiges des remparts du 12è siècle.
(Bois gravé de Lamperschelf)

Ce n'est pas le seul point de comparaison entre les deux villes jumelles. On y remarque un identique développement démographique et économique. Durant les années s'écoulant du début du règne de Louis XVI à la fin de celui de Napoléon 1er, Jülich avait une population oscillant autour de 2000 habitants. A peu près la même qu'à Haubourdin. Jusqu'en 1850, une lente progression se manifeste dans les deux villes. Les premières industries agricoles et alimentaires apparaissent. Mais cette industrialisation n'entraîne pas un exode rural massif. Les communes du canton et du kreis sont presque aussi peuplées que le chef-lieu et alimentent les usines sans provoquer un gonflement de la ville centre.

Haubourdin va se "désolidariser" au cours du Second Empire. On y comptera plus de 4000 âmes en 1870. Jülich n'atteindra ce chiffre qu'en 1895. Dix ans plus tard, Haubourdin a encore une nette avance : 8485 habitants contre 6007. Elle sera grignotée lentement jusqu'à la seconde guerre mondiale. En 1957, la ville allemande a, à peu près, effacé les conséquences des destructions de la seconde guerre mondiale et compte, déjà 13000 âmes. Haubourdin n'en a que 11000. Depuis, le centre de recherche nucléaire de Rhénanie du Nord-Westphalie a entraîné une nouvelle progression, quelque peu artificielle il est vrai, de Jülich qui s'est renforcée encore par la fusion des communes de la périphérie avec le chef-lieu.

Les deux villes ont connu, avant la Révolution, une réelle indépendance. Propriété de seigneurs puissants, elles bénéficièrent de privilèges, même si, souvent, l'administration fut laissée à des mandataires du souverain. Mais les ducs de Jülich se montrèrent plus turbulents que les seigneurs ou vicomtes d'Haubourdin. Il est vrai qu'ils avaient fort à faire pour se faire respecter de puissants et non moins belliqueux voisins.

En 1792, l'armée française de Dumouriez prend l'offensive contre les Hollandais et les Autrichiens. Le 6 novembre, elle remporte la victoire de Jemmapes et vient border le Rur face aux Autrichiens.

Karl Théodor von Pfalz Salzbach, duc de Jülich, est officiellement neutre. Mais les troupes autrichiennes n'en tiennent pas compte et occupent le duché. Le ler mars 1793, les "sans culotte" font retraite vers la Belgique. Ils reviennent l'année suivante et, le 23 mars, prennent Aix-la-Chapelle. Les Autrichiens se retranchent sur la ligne Düren, Jülich, Linnich. Cela dure plusieurs mois. Le 2 octobre, enfin, Linnich tombe aux mains des Français. La nuit suivante, les troupes autrichiennes se replient sur Cologne et Düsseldorf. Le 3 octobre, les Français défilent dans Jülich derrière leurs clairons et en chantant "La Marseillaise".

Le peuple et les notables votent la déchéance de la "ploutocratie". A peu près à la même époque, les prêtres jureurs haubourdinois manifestaient leur "hayne à la royauté".

Cette victoire de Jülich a valu à Lille de posséder une rue de Juliers (actuellement rue Jules Guesde). C'est la traduction française du nom allemand, comme en fait foi le "Petit Larousse".

Pendant près de vingt ans, Jülich sera un chef-lieu de canton de la République, puis de l'Empire français. Il ne semble pas que cette période ait laissé de mauvais souvenirs. Napoléon vint à plusieurs reprises, comme premier consul et comme empereur dans cette ville qu'il aimait. Quand il accéda au trône, le conseil municipal lui vota une adresse de félicitations chaleureuse. C'est sous l'Empire, à la faveur du Blocus Continental, que Jülich eût sa première fabrique de sucre.

Ensuite, pendant plus d'un siècle, on va assister à un développement basé sur la production agricole. La plupart des industries travaillent les produits de la terre, comme les sucreries, ou fabriquent pour la clientèle rurale, comme les fils de fer.

Mais l'histoire qui a abandonné Jülich au lendemain du départ de la garnison française en 1814, va, une nouvelle fois, s'en occuper.

Le 16 novembre 1944, les troupes américaines, bloquées devant le Rur, écrasent la ville sous un déluge de bombes et d'obus. Du 16 novembre 1944 au 23 février 1945, Jülich sera détruit à 97 %. Restent debout les vestiges de la citadelle, la porte des sorcières qui appartenait aux remparts du 13è siècle et quelques rares maisons isolées.

Le 10 octobre 1939, le kreis comptait 52096 habitants. Il en restait 2248 le ler mars 1945, dont quatre dans les ruines de la ville. Un mois plus tard, Jülich comptait 45 habitants.

De ce désert a surgi une ville moderne, qui en 1957, avait retrouvé sa population de 1939.

Ses industries restent fidèles à la tradition : fabrication de papier, sucrerie, atelier de construction, fabrication de fils de fer, laiteries et diverses petites industries. L'économie agricole est à base de betterave sucrière, pommes de terre, céréales et élevage laitier.

Il faut faire une place à part au centre de recherche nucléaire. Véritable ville dans la ville, il pose, avec son personnel nombreux et d'origines diverses, un problème permanent d'intégration, qui a commencé, après 1945, avec la population fuyant l'Allemagne de l'Est. Les nouveaux venus étaient généralement de religion luthérienne, alors que les Rhénans sont catholiques et l'amalgame s'est, tout de même, fait sans trop de difficultés. On peut penser qu'il en sera ainsi avec les "atomistes".

Peut-être l'intégration sera-t-elle facilitée par le folklore notamment le carnaval. A Jülich, comme dans toute la Rhénanie, cette institution a une importance si considérable qu'elle en arrive presque à éclipser Noël.

L'histoire a donc tissé des affinités qui permettent de créer des liens étroits entre les deux villes, et de constituer un jumelage solide entre Jülich et Haubourdin.

Source : Haubourdin dix siècles d'histoire - Augustin Laleine et Mairie d'Haubourdin - 1972